18/11/2010

Un œil sur le futur budget du renseignement français

Quelques notes sur le projet de budget 2011 pour la fonction renseignement, issues de récents documents parlementaires.

Les services (DGSE, DRM, DPSD)

• La DGSE connaîtra une augmentation globale de son budget (+ 12,3%) portant son budget à 543 millions d'euros en autorisation d'engagements. La part des crédits allouée à l'investissement subira une baisse de 23,4 millions d'euros, principalement liée à la refonte des contrats de maintien en condition opérationnelle (MCO).

Des fonds spéciaux viennent s'ajouter à ce budget initial dans le cadre du programme 129. Le montant exact des fonds spéciaux attribués à la DGSE en 2011 n'a pas été détaillé, toutefois, il est à noter que l'ensemble des fonds spéciaux connaîtra une augmentation de 18% (28,3 millions d'euros), atteignant environ 80 millions d'euros. Cette augmentation bénéficiera principalement à l'ANSSI (Agence Nationale de Sécurité des Systèmes d'Information). En 2009, la DGSE avait bénéficié de 80% de la dotation totale des fonds spéciaux.

• En 2010, la DGSE a connu des difficultés dans le paiement de ses indemnités de résidence à l'étranger, versées à ses personnels en mission hors du territoire national. Ces difficultés peuvent trouver une explication dans la multiplication des déploiements liés aux prises d'otages de citoyens français. Au cours des dernières années, ce service a également rencontré des problèmes pour financer ses dépenses de personnel, ayant un recours ponctuel à l'endettement. Du fait de la hausse de son budget, ces difficultés devraient s'amoindrir et faciliter le recrutement, le service gagnant 143 postes en 2011.

• Le budget alloué à la DPSD (Direction de la Protection et de la Sécurité de la Défense), baissera en 2011 de -3,6%, pour un budget global de 93,1 millions d'euros, budget dont plus de 87% sont alloués aux rémunérations et charges sociales. Ce service connaitra une baisse de ses effectifs par la suppression d'une quarantaine de poste, dans le cadre d'une réduction de personnel qui s'étendra jusqu'en 2014.

• Au sein de la DGSE, comme de la DPSD, la priorité en matière de recrutement est portée sur les cadres de haut niveau et les experts techniques. Cette décision est cohérente avec la direction prise dans les investissements qui se portent vers l'amélioration des moyens techniques de collecte et de traitement de l'information. Cette politique de recrutement semble faire moins de place aux analystes-exploitants, longtemps considérés comme le cœur de métier des services français.

• Le budget consacré à la DRM (Direction du Renseignement Militaire) s'élèvera à 156,4 millions d'euros pour l'année 2011, sans marquer d'évolution sensible avec le budget de l'année précédente. Ses effectifs demeureront assez stables, malgré une vingtaine de transferts vers d'autres services.

Les drones et capteurs aéroportés

• Concernant les drones tactiques, 53 drones CL 289 seront retirés du service, quelques dizaines de drones israéliens Skylark sont toujours en service (COS), les armées disposant également de plus d'une centaine de systèmes DRAC et d'une vingtaine de drones SDTI.

• L'armée de l'air déploie un seul système de drone MALE (Moyenne Altitude, Longue Endurance), le SIDM (Harfang). Elle dispose actuellement d'un seul système complet et de trois drones, dont un exemplaire endommagé. Elle devrait prochainement recevoir une station sol supplémentaire, ainsi qu'un vecteur neuf.

• Dès 2013, la France subira une pénurie de drones MALE et sera amenée à choisir de nouveaux systèmes. Deux solutions sont à l'étude, la première consistant à adopter le Predator américain, la seconde, à se doter d'autres drones Harfang en attendant un drone européen arrivé à maturité technique, le Talarion (EADS) ou le Mantis (Dassault-BAE). Il est à noter que la France a renoncé à se doter de drones HALE (Haute Altitude, Longue Endurance), tels que le Global Hawk américain ou le Eurohawk allemand.

• En 2011, l'armée de l'air va conclure le programme de rénovation de ses deux C-160 G (Transall Gabriel), dédiés au renseignement d'origine électromagnétique (ROEM). Ces appareils disposent de systèmes embarqués complets permettant la collecte, le traitement et l'analyse des signaux. En service depuis 1989, l'obsolescence de de ces deux appareils a été soulignée à plusieurs reprises.

• Les Rafale de la Marine et de l'Armée de l'Air recevront en 2011 six nouveaux exemplaires du pod de reconnaissance Reco-NG, après n'avoir reçu que quatre des six pods prévus en 2010.

• Le report de la rénovation des Mirage 2000D au-delà de l'année 2013 a suscité des inquiétudes concernant le maintien de certaines capacités ELINT. En effet, le retrait du service du Mirage F1CR en 2014, capable d'emporter le pod ASTAC (Analyseur de Signaux TACtiques), ferait perdre à la DRM le bénéfice des données collectées par ce système. Un amendement a donc été adopté afin de procéder à la rénovation d'un nombre minimum de Mirage 2000D afin de maintenir cette fonction de reconnaissance électronique.

Les moyens satellitaires

• Le programme européen de satellites d'observation MUSIS se poursuit, avec notamment une amélioration des capacités infrarouges et de la résolution des capteurs optiques. Cette nouvelle génération de satellite permettra de remplacer les satellites Hélios II, dont l'activité prendra fin en 2015-2016.

• En matière d'interception des communications (COMINT), la constellation de satellites Essaim verra la fin de son exploitation en 2010, avec la désorbitation des quatre satellites expérimentaux. Fin 2010, quatre microsatellites Elisa seront placés en orbite basse, pour des missions de détection de signaux radars. Ces deux programmes forment le préalable au futur système CERES (Capacité de Renseignement Électromagnétique Spatial), système d'interception ELINT/COMINT dont la mise en service prévue pour 2016 pourrait être reportée jusqu'en 2020.

• Les deux microsatellites du programme d'alerte spatiale Spirale devraient poursuivre leur mission.

Le renseignement intérieur et l'intelligence économique

• Les crédits accordés à la DCRI (Direction Centrale du Renseignement Intérieur) pour l'année 2011 n'ont pas été détaillés et sont intégrés dans le budget global de la police nationale, qui connaitra une croissance d'environ 12%. En 2008, la DCRI était dotée d'un budget de fonctionnement d'environ 41 millions d'euros. La DCRI reçoit également des fonds spéciaux, qui s'élevaient en 2009 à 600 000 euros. Le service devrait bénéficier de l'effort de modernisation technologique entrepris dans le cadre de la LOPPSI.

• L'annexe au rapport sur le projet de loi de finances 2011 concernant la défense, souligne l'importance de l'intelligence économique, mais n'y consacre qu'un très court paragraphe, sans annoncer de mesure particulière concernant ce domaine.

1 commentaire:

  1. "Cette politique de recrutement semble faire moins de place aux analystes-exploitants, longtemps considérés comme le cœur de métier des services français."

    Pourtant ce ne sont pas les candidats qui manquent...

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